Les "colorations" GSAM (traçages) et le mode opératoire

dimanche 17 mai 2020
par  Olivier
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Dans le Doubs, la quasi totalité des terrains qui affleurent sont calcaires. Le relief et le monde souterrain résultent d’une érosion particulière de ces formations carbonatées, appelée érosion karstique ; son produit s’appelle le karst.

La nature du sous-sol explique la pauvreté de la région en circulations de surface et l’existence d’un réseau hydrographique lâche. Il est donc logique de trouver un faible nombre de vallées où se concentrent les émergences karstiques. Cette origine explique aussi certains caractères particuliers du régime des rivières comme leur réponse rapide à un épisode pluvieux, mais aussi leur baisse de niveau rapide par temps sec. Le régime de la haute vallée du Doubs avec ses crues violentes et les étiages prononcés en est un exemple significatif. Des phénomènes de capture par érosion régressive dans des conduits souterrains à l’origine sont responsables des déviations du Doubs dans son cours supérieur (Gorges du Fourperret) et de son cours moyen (Clos du Doubs) et d’une évolution irréversible vers une liaison permanente entre Doubs et Loue à partir de Pontarlier.

UNE METHODE D’ETUDE PRIVILEGIEE DU KARST JURASSIEN : LES TRAÇAGES

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Quelque fois accidentels, comme par exemple la mise en évidence de la capture du Doubs par la Loue (Incendie des usines Pernod à Pontarlier en 1901 & le parcours de l’Absinthe déversé), la liaison entre le Creux Billard et la Source du Lison, les traçages ont permis de mettre en évidence les principales circulations souterraines du massif du Jura.

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C’est sur, on est tracé ...
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De nos jours, l’emploi de colorants spécifiques, doublés d’une analyse sophistiquée des eaux prélevées aux points de résurgence, permet une analyse précise du fonctionnement hydrogéologique des aquifères karstiques de notre région.

L’expérience la plus classique fondée sur la réponse d’un exutoire à une stimulation provoquée artificiellement est l’essai de traçage, longtemps connu sous l’appellation de "coloration".




UN TRACAGE, MAIS POURQUOI FAIRE ?

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Depuis 1886, date de la première expérience de traçage (liaison entre les entonnoirs de Nancray et les Sources d’Arcier), des centaines de traçages ont été réalisés en Franche-Comté …

Ces expériences ont été motivées par un souci de compréhension des mécanismes internes des systèmes et aquifères karstiques (études fondamentales) mais également nécessitées pour un grand nombre d’applications pratiques :

– L’exploitation des eaux karstiques (ex : aux émergences aux Sources d’Arcier, par forage, captage de la forêt de Chailluz, etc

– La prévention des pollutions par la délimitation des bassins versants et des périmètres de protection des captages. Cette connaissance permet de contrôler l’implantation d’établissements à caractère polluant, les épandages agricoles et les boues d’épuration ainsi que les stockages de déchets, tout en permettant une action efficace en cas de déversement accidentel.

– Les travaux publics et le génie civil en terrain karstique (percements de tunnels et fondations, définition de mesure de prévention en cas de déversement (fosses de décantation, étanchéification, bassins de rétention, déversoirs, etc …).

– L’exploitation d’aquifères karstiques pour la production d’énergie (pompes à chaleur) ou encore barrage hydroélectrique. Il faut souligner que cette exploitation du karst à des fins énergétiques était généralisée au début du siècle comme l’atteste les vestiges de nombreux moulins et scieries au droit des gouffres pertes (Moulin du Narbief, Moulin de la Goulay, au Bizot etc…) et aux émergences principales (source de la Loue, moulin de Vermondans, etc …).

– Le contrôle et la régulation du débit des sources karstiques et des rivières (pertes du Doubs dans la région de Pontarlier, …)

– L’exploitation piscicole des émergences karstiques ou plus simplement la détérioration de la qualité des eaux des rivières tributaires des circulations souterraines

– L’interférence entre la qualité et la quantité des eaux et le tourisme (entonnoirs d’absorption au fond des bassins du Doubs compromettant l’esthétisme du Saut du Doubs, détérioration de la qualité des eaux des principales rivières piscicoles, etc …).




LES TRACAGES AVEC LA CONTRIBUTION DU GSAM

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Date Commune Cavité Projet Commentaires
1984 Solemont Trou de La Fiautre Coloration pour compléter l’exploration Apres avoir obtenu 2 kgs de fluorescéine
du S. R. A. E. , no us décidons de colorer la
Fiautre, le 14 Avril 1984, juste après les
crues de printemps. . Malgré tous nos efforts, la perte de
la Fiautre garde son secret.
CR détaillé voir escarpolette n°7

Et escarpolette n°6

1986 Villars-les-Blamont Gouffre des Bruyères coloration pour compléter l’exploration Le 14 juin 1986, coloration par le GSAM, avec 2 kg de fluorescéine, la réapparition n’a pas été constatée. CR dans l’Escarpolette N°8
1989 Chazot Puits Fenoz Coloration pendant le pompage du Puits Fenoz, pour vérifier que l’on ne pompait pas l’eau déjà pompée... CR détaillé voir Article
1992 Villars-les-Blamont coloration des rejets de la station d’épuration du village pour vérifier la non pollution du captage d’eau de Blamont le Groupe Spéléologique et Archéologique de Mandeure a su impliquer une classe de 4ème du Collège de Blamont Article
1999 Mandeure Puits de la Charme Dans le cadre des journées environnement, le GSAM a choisi de traiter le problème de pollution en milieu karstique Les enfants ont pu observer les différents ossements d’animaux domestiques mais aussi d’animaux sauvages tombés accidentellement. Mais le plus intéressant, après un petit cours sur les traçage fut d’assister à une coloration du gouffre à la fluorécéine. Article
2020 Montenois Gouffre du Truchot Coloration pour compléter l’exploration en cours Un traçage inattendu avec la réapparition du colorant où on ne l’attendait pas ! article

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En 1999, à Mandeure
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Une méthode peu orthodoxe ...
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Jean-Paul en action, Coloration lors du pompage du puits Fenoz à Chazot des eaux rejetées...



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Coloration au Gouffre du Truchot en 2020

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LE MODE OPERATOIRE

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La spéléologie, éthymologiquement "étude et exploration des cavernes", dans son acceptation originelle est basée sur la recherche, l’étude et la compréhension des mécanismes à l’origine de la formation et de l’évolution du karst ainsi que de ses habitants actuels ou passés (géologie, hydrogéologie, biospéologie mais également paléontologie et préhistoire).


Les spéléologues, forts de leurs expériences, ont acquis une connaissance irremplaçable de terrain et organisent des projets de coloration des eaux souterraines, afin de parfaire les connaissances sur les circulations du karst, ces traçages étant à la base de toutes études ultérieures.


Une expérience de traçage est une opération d’envergure qui exige d’avoir un minimum d’organisation tout au long du processus. 
Le mode opératoire en pièce-jointe, réalisé par le GSAM dans le cadre du GIPEK, est une des réponses à ce soucis de résultats. 






Cliquez sur la couverture



LES PERTES DU DOUBS OU LES MESAVENTURES D’UN APERITIF

Forcément, ce n’est pas une coloration GSAM ….
Mais tant de Pont’ passer sous les ponts, ça ne laisse pas indifférent un spéléo …




Extrait de "UNIVERS" Numéro spécial "Le Monde souterrain" - Juin 1985

Le dimanche 11 Août 1901, à midi et demi, débutait à Pontarlier, l’incendie des usines Pernod, situées à proximité du Doubs : " Les caves renfermaient, au moment de l’incendie, 1 800 hectos de trois-six et 4 700 hectos d’absinthe, soit 650 m3 d’un liquide capable de donner une odeur très nettement perceptible à un volume d’eau plusieurs milliers de fois plus considérable." (Fournier 1926). Pour éviter une plus grave catastrophe, le précieux breuvage fut déversé volontairement dans le puits perdu de l’usine.

Le mardi 13 Août, à midi, l’absinthe commençait a apparaître à la source de la Loue, distante, en ligne directe de 13 kilomètres. Le mercredi matin : " L’odeur s’était répandue le long du cours de la Loue ; à Mouthier, elle était aussi forte que celle d’un verre d’absinthe pris à la table d’un café. Elle était plus faible dans la caverne, avec un léger goût d’anis communiqué à l’eau. Au dessous de la chute initiale de la Loue, l’eau moussait en flocons blancs, d’aspect savonneux ; dans les remous, elle accumulait d’énormes paquets d’écume vert sale." (Berthelot 1901). Les analyses de Berthelot décelèrent nettement la présence d’essence d’anis et d’un liquide vert, épais à base d’essence d’absinthe et d’une résine spéciale : " Ces caractères, dit-il, ne laissent subsister aucun doute sur l’épanchement de la liqueur originelle dans les eaux de la Loue ; aucun corps de ce genre ne saurait préexister dans une eau naturelle."

Depuis longtemps, les riverains du Doubs devaient faire face au problème chronique de l’assèchement de la rivière en aval de Pontarlier lors des périodes d’étiage en raison de l’existence de pertes dans le lit du Doubs, à la hauteur de Pontarlier, Arçon et Maison-du-Bois. Pour réduire ces infiltrations, les pertes avaient été colmatées à l’argile et, en 1908, le Syndicat des Usiniers du Doubs fit bétonner certaines d’entre elles. Le débit du Doubs à l’étiage s’en trouva temporairement amélioré, d’autant que l’on releva dans le même temps le niveau du lac de Saint-Point. Fournier considérait que l’absinthe avait fait la preuve de ses hypothèses, admettant une communication entre les pertes du Doubs et la Source de la Loue, cependant tout le monde ne partageait pas cette conviction, et en particulier la presse qui s’appuyait sur les résultats d’une expérience datant de 1872 pour réfuter la thèse du géologue bisontin. En effet, le 16 Juillet 1872, Gresset et Maire, avaient, alors que le Doubs était à sec en aval d’Arçon, déversé 5 000 kg de sel marin dans la rivière au barrage d’Arçon. Le sel était réapparu le lendemain dans la vallée du Doubs, entre Entreroches et Remonot (Puits de Sombrenon), tandis que la Source de la Loue ne montrait aucun indice de salinité. Pour vaincre ses détracteurs, Fournier devait donc prouver que l’expérience de 1872 n’avait pas été réalisée dans des conditions optimale et que le traçage accidentel à l’absinthe était le bon !



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Extrait powerpoint présentation POLE KARST
Patrimoines karstiques d’ici et d’ailleurs, 5 décembre 2019

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Fournier, Maréchal et Martel confirment la capture partielle du Doubs par la Loue


Le 31 Août 1910, Eugène Fournier, E.A. Martel (le fondateur de la spéléologie) et le docteur Maréchal procède à l’injection de 100 kilogrammes de fluoresceïne directement dans les pertes du Doubs à Maison-du-Bois entre 14h30 et 16h00.

"Aucune coloration ne reparut à l’aval dans le lit du Doubs, bien que la surveillance, et même l’examen fluorescopique, aient été poursuivis pendant plusieurs jours par la Service des pont-et-Chaussées et par nous même (du 1er au 4 Septembre). Mais dès 8 heures du matin, le 3 Septembre, nous constations l’apparition d’une coloration, extrèmement intense, à la source de la Loue ; à deux heures de l’après-midi, cette coloration arrivait à Mouthier et à 3h30 à Lods ; elle persistait encore à Mouthier pendant toute la journée du 4 Septembre et s’affaiblissait graduellement au cours de la journée du 5. En aval, la coloration fut observée dans un grand nombre de village traversés par la Loue ... et ce jusqu’à Quingey où elle était devenu peu visible. On peu afffirmer hautement que toute la matière colorante déversée dans les pertes du Doubs est ressortie à la Loue et qu’il n’en a pas été restitué une parcelle au cours inférieur du Doubs.

Toutes les véritables pertes sont donc tributaires de la Loue et ... seules les eaux qui s’infiltrent dans les alluvions du lit mineur du Doubs reviennent dans cette rivière à l’aval, comme l’a montre l’expérience de Gresset et Maire ...." (Fournier 1926)

Depuis la démonstration de Fournier, les querelles entre riverains de la Haute-Loue et du Haut-Doubs ne sont pas rares, elles ressurgissent à chaque étiage prolongé, les uns craignant de voir leur rivière tarir tandis que les autres tentent de conserver le leur ...

Cette question reste d’actualité, à l’heure où l’on cherche les remèdes destinés à garantir un débit minimum du Doubs ..., phénomène encore accentué par les proliférations d’algues vertes en période estivale qui compromettent à la fois la qualité de la rivière et l’image de cette région du Haut-Doubs. Il faut signaler que d’autres pertes ont été reconnues récemment environ 500 mètres en amont de la Grotte du Trésor ... S’agit-il d’une nouvelle capture ? au profit de quelle source ? Le mystère reste entier ...





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